Les fonctions continues sont les fonctions dont le graphe se trace « sans lever le crayon ».
Les fonctions de référence connues à ce jour sont toutes continues sur leur domaine de définition. Plus précisément
Soit $x$ un réel. La partie entière du réel $x$ est le plus grand entier relatif inférieur ou égal à $x$. La partie entière du réel $x$ est notée $E(x)$.
Par exemple, le plus grand entier relatif inférieur ou égal à $3,7$ est $3$ et donc $E(3,7)=3$, le plus grand entier relatif inférieur ou égal à $-2,6$ est $-3$ et donc $E(-2,6)=-3$ et le plus grand entier relatif inférieur ou égal à $4$ est le nombre $4$ lui-mê me et donc $E(4)=4$.
On va maintenant construire le graphe de la fonction $E$.
Le graphe de la fonction partie entière est donc
Ainsi, pour tout réel $x$ de $[0,1[$, $E(x)=0$ et donc, quand $x$ tend vers $1$ par valeurs inférieures, $E(x)$ tend vers $0$. D'autre part, $E(1)=1$. Donc, $E(1)$ n'est pas la limite de $E(x)$ quand $x$ tend vers $1$. La fonction partie entière n'est pas continue en $1$. Pour tracer son graphe, nous avons été obligé de « lever le crayon »~en franchissant le point d'abscisse $1$.
Les différents théorèmes sur les limites nous donnent immédiatement le théorème suivant :
Ainsi, une somme ou un produit de fonctions continues est une fonction continue et un quotient de fonctions continues dont le dénominateur ne s'annule pas est une fonction continue. En particulier :
Une composée de fonctions continues est également continue :
Exemple. Soit $f$ la fonction $x\mapsto\sqrt{2x+3}$. Pour $x\in I=\left[-\dfrac{3}{2},+\infty\right[$, posons $g(x)=2x+3$ et pour $y\in J=[0,+\infty[$, posons $h(y)=\sqrt{y}$. Pour tout réel de $I$, on a $g(x)\geqslant0$ ou encore $g(x)\in J$ et de plus, pour tout réel $x$ de $I$, on a $f(x)=h(g(x))$.
La fonction $g$ est continue sur $I$ en tant que fonction polynôme et pour tout réel $x$ de $I$, $g(x)$ appartient à $J$ puis la fonction $h$ est continue sur $J$. On en déduit que la fonction $f=h\circ g$ est continue sur $I$.
Ainsi, la fonction $x\mapsto\sqrt{2x+3}$ est continue sur $\left[-\dfrac{3}{2},+\infty\right[$. La calculatrice donne le graphe suivant :
On admettra le théorème suivant :
Il revient au mê me de dire que si $f$ est continue sur $[a,b]$ et si $k$ est un réel compris au sens large entre $f(a)$ et
$f(b)$, alors l'équation $f(x)=k$ a au moins une solution dans $[a,b]$. On note qu'il est possible que cette équation ait
plusieurs solutions ou encore le réel $x_0$ du théorème 5 n'est pas uniquement défini. On note aussi que $f(a)$ et $f(b)$
sont dans un ordre quelconque. On peut avoir $f(a)
Puisque $f$ est continue sur $[a,b]$, le théorème 5 nous permet d'affirmer qu'il existe au moins un réel $x_0$ tel que $f(x_0)=k$.
Mais $f$ est aussi strictement monotone sur $[a,b]$. En particulier, deux réels de $[a,b]$, distincts l'un de l'autre, ont
des images différentes par $f$ et donc si $x$ est un réel de $[a,b]$ différent de $x_0$, alors $f(x)\neq f(x_0)$ ou encore $f(x)\neq k$.
Ceci montre l'unicité du réel $x_0$.
On s'interesse à l'équation
Pour tout réel $x$, posons $f(x)=x^3+x$. L'équation $(E)$ s'écrit alors : $f(x)=1$.
La fonction $f$ est continue sur $\mathbb{R}$ en tant que fonction polynôme et la fonction $f$ est strictement croissante sur $\mathbb{R}$ en tant que somme de deux fonctions strictement croissantes sur $\mathbb{R}$ (on peut aussi écrire : pour tout réel $x$, $f'(x)=3x^2+1>0$).
Si $x<0$, alors on a $f(x)
D'autre part, la fonction $f$ est continue et strictement croissante sur $[0,1]$ et donc, d'après le corollaire au théorème des valeurs intermédiaires, pour tout réel $k$ compris au sens large entre $f(0)=0$ et $f(1)=2$, l'équation $f(x)=k$ admet une solution et une seule dans l'intervalle $[0,1]$. Comme $0\leqslant 1\leqslant 2$, l'équation $f(x)=1$ admet une solution et une seule dans $[0,1]$.
En résumé,
On note $\alpha$ cette solution. Il n'est malheureusement pas question d'obtenir la valeur exacte de $\alpha$ (tout au moins en terminale) ou encore, en terminale, on ne peut pas résoudre l'équation $x^3+x=1$ « de manière exacte ».
Néanmoins, on ne s'arrê te pas là. Si on ne peut pas déterminer la valeur exacte de $\alpha$, on va tout de mê me déterminer une valeur approchée de $\alpha$ à une précision donnée. Déterminons par exemple une valeur approchée de $\alpha$ à $10^{-3}$ près par défaut c'est-à-dire un réel $a$ tel que $a\leqslant \alpha\leqslant a+10^{-3}$. On dispose de nombreuses méthodes pour y parvenir. On exposera ici deux méthodes : la méthode par balayage et la méthode par dichotomie.
Quelque soit la méthode, il y a une idée générale à la base : puisque $f$ est strictement croissante sur $[a,b]=[0,1]$,
alors si $c$ est un réel de $[a,b]$ tel que $f(c)<1$ ou encore $f(c)
On peut visualiser cette idée dans un tableau de variation.
Méthode par balayage. La première idée qui vient à l'esprit consiste à faire « balayer »~l'intervalle $[0,1]$ par $x$ en partant de $0$ et en avançant jusqu'à $1$ avec des petits pas de $0,001$. Pour chacune des valeurs de $x$ considérées, on calcule l'image de $x$ par $f$ et on reporte ces valeurs dans un tableau. Quand $f(x)$ franchit le nombre $1$, on a alors un encadrement de $\alpha$ entre deux nombres distants l'un de l'autre de $0,001$.
Cette méthode a un défaut évident : le nombre de calculs effectués. Pour obtenir trois décimales du nombre $\alpha$, on peut calculer jusqu'à $999$ images par $f$ (et mê me $1001$ si on recalcule $f(a)$ et $f(b)$).
On améliore l'idée précédente. Chaque nouvelle décimale de $\alpha$ nécessitera $10$ calculs au plus.
On divise d'abord l'intervalle $[0,1]$ en dix parties de longueur $10^{-1}=0,1$. Plus précisément, on fait afficher par la calculatrice les images par $f$ des réels $0$, $0,1$ $0,2$ … $0,9$ et $1$ dans un tableau de valeurs. On obtient
$x$ | $f(x)$ |
$0$ | $0$ |
$0,1$ | $0,101$ |
$0,2$ | $0,208$ |
$0,3$ | $0,327$ |
$0,4$ | $0,464$ |
$0,5$ | $0,625$ |
$0,6$ | $0,816$ |
$0,7$ | $1,043$ |
$0,8$ | $1,312$ |
$0,9$ | $1,629$ |
$1$ | $2$ |
Puisque $f(0,6)<1$ et $f(0,7)>1$, on obtient déjà $0,6<\alpha<0,7$ ou encore la première décimale de $\alpha$ est $6$.
On recommence en balayant cette fois-ci l'intervalle $[0,6;0,7]$ avec un pas de $0,01$. On obtient
$x$ | $f(x)$ |
$0,6$ | $0,816$ |
$0,61$ | $0,836981$ |
$0,62$ | $0,858328$ |
$0,63$ | $0,88047$ |
$0,64$ | $0,902144$ |
$0,65$& | $0,924625$ |
$0,66$ | $0,947496$ |
$0,67$ | $0,970763$ |
$0,68$ | $0,994432$ |
$0,69$ | $1,018509$ |
$0,7$ | $1,043$ |
On a donc $0,68<\alpha<0,69$ ou encore $\alpha=0,68…$ On recommence en balayant l'intervalle $[0,68;0,69]$ avec un pas de $0,001$. On obtient
$x$ | $f(x)$ |
$0,68$ | $0,994432$ |
$0,681$ | $0,996821241$ |
$0,682$ | $0,999214568$ |
$0,683$ | $1,001611987$ |
$0,684$ | $1,004013504$ |
$0,685$ | $1,006419125$ |
$0,686$ | $1,008828856$ |
$0,687$ | $1,011242703$ |
$0,688$ | $1,013660672$ |
$0,689$ | $1,016082769$ |
$0,69$ | $1,018509$ |
En ayant effectués $33$ calculs d'images, on a obtenu $0,682<\alpha<0,683$ ou encore $\alpha=0,682$ à $10^{-3}$ près par défaut.
Méthode par dichotomie.
On démarre de la mê me façon : $f(0)=0$ et $f(1)=2$ et donc $0<\alpha<1$.On calcule ensuite la valeur de $f$ au milieu de l'intervalle $[0,1]$ ou encore on calcule $f(0,5)$. Suivant la position de
$f(0,5)$ par rapport à $f(\alpha)=1$, on pourra décider si $\alpha$ est dans $[0;0,5]$ qui est la première moitié de l'intervalle $[0;1]$
ou dans $[0,5;1]$ qui est la deuxième moitié de l'intervalle $[0;1]$.
On trouve $f(0,5)=0,625$ et donc $f(0,5)<\alpha$ puis $0,5<\alpha<1$.
On recommence. On coupe en deux l'intervalle $[0,5;1]$ (la dichotomie est justement la division en deux parties d'un ensemble). On calcule l'image du milieu de cet intervalle par $f$ ou encore on calcule $f(0,75)$ …
On obtient ainsi successivement des encadrements d'amplitudes $1$, $\dfrac{1}{2}$, $\dfrac{1}{4}$, … De manière générale, au bout de $n$ étapes, on obtient un encadrement d'amplitude $\dfrac{1}{2^n}$. C'est tout l'intérê t de la méthode. La suite géométrique $\left(\dfrac{1}{2^n}\right)_{n\in\mathbb{N}}$ décroit très vite et on obtient donc rapidement des décimales exactes.
$x$ | $f(x)$ | encadrement de $\alpha$ | amplitude de l'encadrement |
$0$ | $0$ | ||
$1$ | $2$ | $0<\alpha<1$ | $1$ |
$0,5$ | $0,625$ | $0,5<\alpha<1$ | $0,5$ |
$0,75$ | $1,17…$ | $0,5<\alpha<0,75$ | $0,25$ |
$0,625$ | $0,86…$ | $0,625<\alpha<0,75$ | $0,125$ |
$0,6875$ | $1,01…$ | $0,625<\alpha<0,6875$ | $0,0625$ |
$0,65625$ | $0,93…$ | $0,65625<\alpha<0,6875$ | $0,03125$ |
$0,671875$ | $0,97…$ | $0,671875<\alpha<0,6875$ | $0,015625$ |
$0,6796875$ | $0,99…$ | $0,6796875<\alpha<0,6875$ | $0,0078125$ |
$0,68359375$ | $1,003…$ | $0,6796875<\alpha<0,68359375$ | $0,00390625$ |
$0,681640625$ | $0,99…$ | $0,681640625<\alpha<0,68359375$ | $0,001953125$ |
$0,6826171875$ | $1,0006…$ | $0,681640625<\alpha<0,6826171875$ | $0,0009…<10^{-3}$ |
Nous avons calculé douze images seulement et nous avons obtenu un encadrement d'amplitude au plus $10^{-3}$. La méthode a un défaut : la division en deux parties égales s'adapte assez mal aux décimales d'un nombre. Mais on n'est pas obligé de couper en deux parties égales. A chaque étape, on a le droit de calculer l'image d'un nombre proche du milieu mais qui n'est pas le milieu. Cela donne :
$x$ | $f(x)$ | encadrement de $\alpha$ | amplitude de l'encadrement |
$0$ | $0$ | ||
$1$ | $2$ | $0<\alpha<1$ | $1$ |
$0,5$ | $0,625$ | $0,5<\alpha<1$ | $0,5$ |
$0,8$ | $1,312$ | $0,5<\alpha<0,8$ | $0,3$ |
$0,7$ | $1,043$ | $0,5<\alpha<0,7$ | $0,2$ |
$0,6$ | $0,816$ | $0,6<\alpha<0,7$ | $0,1$ |
$0,65$ | $0,92…$ | $0,65<\alpha<0,7$ | $0,05$ |
$0,68$ | $0,99…$ | $0,68<\alpha<0,7$ | $0,02$ |
$0,69$ | $1,01…$ | $0,68<\alpha<0,69$ | $0,01$ |
$0,685$ | $1,006…$ | $0,68<\alpha<0,685$ | $0,005$ |
$0,683$ | $1.001…$ | $0,68<\alpha<0,683$ | $0,003$ |
$0,681$ | $0,99…$ | $0,681<\alpha<0,683$ | $0,0009…<10^{-3}$ |
$0,682$ | $0,99…$ | $0,682<\alpha<0,683$ | $0,001$ |
En ne calculant pas toujours l'image du milieu de l'intervalle, on a légèrement augmenté le nombre d'étapes. Ici, nous sommes passés de douze calculs d'images à treize calculs.
Revenons à notre problème initial. Nous avons que montré l'équation $f(x)=1$ admet une solution et une seule dans $\mathbb{R}$ que l'on note $\alpha$ et nous avons établi que $0,682<\alpha<0,683$. Pour achever le travail, il nous reste à représenter graphiquement la fonction $f$ :